Entretien avec Grace Mwagi, travailleuse dans une ferme horticole certifiée Fairtrade au Kenya
La production horticole locale ne pouvant répondre à la demande, près de 90 % des fleurs coupées vendues sur le marché helvétique sont importées. En Suisse, la commercialisation de fleurs issues du commerce équitable remonte à 2001. À l’occasion du 15e anniversaire des fleurs Fairtrade organisé par Max Havelaar (Suisse) dans la gare centrale de Zurich, nous avons eu la chance de nous entretenir avec Grace Mwangi. Cueilleuse de roses, elle travaille depuis 12 ans dans une ferme horticole certifiée Fairtrade au Kenya.
Chère Grace, bienvenue en Suisse, et merci infiniment de nous accorder de ton temps. Tu travailles en tant que cueilleuse de roses dans une ferme horticole certifiée Fairtrade au Kenya. Peux-tu nous dire quelques mots sur toi et ta famille ?
Avec plaisir. J’ai deux enfants, un garçon de onze ans et une fillette de six ans. J’élève mes enfants seule, et je fais tout pour assurer la meilleure vie possible à mes enfants. Je suis donc très organisée. J’ai un emploi du temps très structuré afin de gérer au mieux le quotidien, mon travail et mes finances. Mes enfants ont la chance d’être élèves dans un internat que je peux payer grâce à mon salaire Fairtrade.
Comment vis-tu au quotidien ? Pourrais-tu nous décrire une journée (de travail) type ?
En règle générale, je me lève à 5 h du matin, car j’ai beaucoup de choses à faire. Je possède une vache et trois moutons. Comme je n’ai pas d’ouvrier pour s’occuper des animaux, je le fais moi-même avant de partir au travail. Je trais la vache, je donne à manger aux animaux, puis je pars à la ferme horticole. En moyenne, je travaille 7 heures et demie par jour, de 7 h 30 à 16 h.
Est-ce que Fairtrade t’apporte quelque chose de concret au quotidien ?
Oui, en tant qu’ouvrière, je bénéficie directement de Fairtrade à de nombreux niveaux. Je travaille dans un environnement sûr, je porte des vêtements de protection de bonne qualité, j’ai des horaires raisonnables et j’ai la sécurité de l’emploi. Un autre avantage de Fairtrade est la communauté. Nous habitons dans les environs de la ferme.
Je suis fière de Fairtrade, car je peux en profiter directement en tant qu’ouvrière et cela bénéficie également à ma famille et à l’ensemble de la communauté. Ici, sur le site, nous avons aussi un restaurant où nous pouvons manger et il y a même des ordinateurs sur lesquels je peux lire mes e-mails ! Aujourd’hui, nous avons un bien meilleur accès aux soins médicaux et nous avons même la possibilité de former des équipes de sport. C’est une motivation énorme ! Rien que le fait de recevoir un salaire me rend forte.
La dernière fois que tu es venue ici, tu as participé au lancement de notre campagne Fair Trade Town. Glarus Nord est devenu le premier Fair Trade Town de Suisse il y a un mois ! Et d’autres villes sont en bonne voie de le devenir à leur tour.
J’en suis très heureuse ! Cela me motive énormément. J’aimerais encourager tout le monde à participer à Fair Trade Town et à se rassembler dans le cadre de la campagne ! Plus nous sommes nombreux, plus nous pouvons démontrer la cohésion entre les productrices/producteurs et les consommatrices/consommateurs.
À ton avis, pourquoi la campagne Fair Trade Town est-elle importante ? On pourrait aussi se contenter d’acheter des produits issus du commerce équitable et en rester là.
Je trouve la campagne très importante, car j’espère que la question du commerce équitable va continuer à s’imposer. Il est très important d’acheter ou de vendre des produits, mais il est tout aussi essentiel de diffuser l’idée sur laquelle ils reposent. Nous souhaitons que le monde entier connaisse le commerce équitable !
Le Kenya est l’un des premiers pays producteurs de fleurs au monde. Tu as beaucoup de chance de pouvoir travailler dans une entreprise certifiée Fairtrade. Connais-tu la situation des autres ouvrières et ouvriers qui travaillent dans des entreprises non certifiées ?
Malheureusement, la situation de ces travailleuses et travailleurs n’est pas bonne du tout. Je connais leur situation, car en tant qu’ambassadrice du commerce équitable, je suis souvent en contact avec d’autres fermes. Ils me racontent leurs problèmes et leurs soucis qui varient d’une ferme à une autre. Dans certains cas, par exemple, ils n’ont pas de tenue de protection, ni même de tenue de travail correcte. Bien souvent, ils n’ont pas non plus de contrat de travail en bonne et due forme. Il se peut très bien qu’ils perdent leur travail et se retrouvent au chômage du jour au lendemain.
C’est pourquoi je suis très heureuse et très fière de pouvoir travailler dans une ferme certifiée depuis 12 ans et d’être l’ambassadrice Fairtrade !